ÂGE D’OR DE LA PEINTURE DANOISE AU PETIT PALAIS

Le Petit Palais présente pour la première fois en France depuis près de trente-cinq ans, une exposition dédiée aux plus belles heures de la peinture danoise, de 1801 à 1864. Peintures précises et délicates, plus de 200 œuvres d’artistes phares de cette période comme Christoffer Eckersberg, Christen Købke, Martinus Rørbye ou encore Constantin Hansen offrent une plongée dans le Danemark du XIXe siècle.

Fruit des recherches récentes d’une équipe internationale, l’exposition entend porter un nouveau regard sur cette période, particulièrement remarquable en matière artistique.
L’exposition est organisée en collaboration avec le Statens Museum for Kunst (SMK) de Copenhague et le Nationalmuseum de Stockholm.
Une nouvelle approche de l’Âge d’or danois.

Constantin Hansen (1804-1880)

Traditionnellement, l’Âge d’or danois correspond à une période d’épanouissement sans précédent de la vie artistique et culturelle au Danemark de 1801 à 1848. Les artistes ont cherché à forger l’image d’une nation puissante et unie, en mettant l’accent sur la bourgeoisie de Copenhague et les paysages bucoliques de leur pays. L’exposition propose une approche plus vaste et originale, prolongeant l’Âge d’or jusqu’en 1864, date de la défaite du Danemark contre la Prusse dans la Seconde Guerre du Schleswig.

Cet événement marque une rupture, tant du point de vue de l’histoire de l’art que de celui de l’histoire des mentalités. L’exposition présente donc, outre Eckersberg et ses élèves, une plus grande diversité d’artistes et inclut de nombreux peintres dits « cosmopolites » qui retrouvent leur place au sein de l’Âge d’or danois. Une plongée dans le Danemark du XIXe siècle. L’exposition propose une approche thématique abordant la vie à Copenhague, l’artiste au travail, le voyage, les paysages, la peinture de plein air, ou encore les portraits de famille.

Le parcours s’ouvre sur la grande figure de l’Âge d’or danois, Christoffer Eckersberg qui est à l’origine du remarquable renouveau artistique du Danemark. Professeur à l’Académie royale, il a formé toute une nouvelle génération de peintres. Le rôle central d’Eckersberg rappelle la place grandissante des artistes dans la société danoise en ce début du XIXe siècle. La vie culturelle est en plein essor, les lieux d’exposition se multiplient et l’émergence d’une bourgeoisie aisée permet aux artistes de pouvoir compter sur des acheteurs réguliers qui deviennent peu à peu collectionneurs. Les artistes « se professionnalisent » grâce à l’Académie royale, et aiment se portraiturer parfois en utilisant de grands formats témoignant de leur nouveau statut social. La vogue du portrait se développe également grâce aux commandes émanant de cette nouvelle bourgeoisie mais aussi par goût pour la représentation du cercle familial intime. Les enfants sont souvent des modèles privilégiés des artistes, reflétant la bonne éducation reçue de leurs parents, valeur essentielle dans la culture danoise.

Les peintres aiment voyager pour parfaire leur technique mais aussi pour développer leur carrière internationale. Ils ramènent d’Italie, des rives de la Méditerranée mais aussi de France ou encore des pays scandinaves de très beaux paysages et scènes de la vie quotidienne, intérieurs de maison, les portraits individuels et les portraits de famille.

En 1849, le droit à la vie privée fut inscrit dans la Constitution danoise, ce qui reflétait l’importance grandissante du foyer en tant que pierre angulaire de la société danoise. À la suite des idées de Jean-Jacques Rousseau, l’innocence des enfants était valorisée et considérée comme un atout. En parallèle, les adultes avaient le devoir de les élever en citoyens responsables. Les artistes voyageurs. Les artistes qui obtenaient la médaille d’or de l’Académie bénéficiaient d’une bourse de voyage pour partir étudier à l’étranger, le plus souvent en Italie. À Rome, ils se formaient au contact des vestiges antiques et de l’art de la Renaissance. Ils peignaient également des scènes pittoresques attendues, voire stéréotypées, qui plaisaient aux collectionneurs danois. Jeunes gens dansant le saltarello, tavernes en plein air, brigands, musiciens ambulants : « le peuple romain » était un genre à part entière en Europe, y compris en littérature.

Dans les années 1840, la défiance politique à l’égard de l’Allemagne, et les théories du philosophe allemand Johann Gottfried Herder sur les caractères nationaux favorisèrent l’essor du scandinavisme. En réaction au culte pour l’Italie, l’historien de l’art danois Niels Laurits Høyen exhorta les artistes à peindre des sujets scandinaves et à tourner leurs regards vers les montagnes norvégiennes et le peuple suédois.

Après 1864, la peinture d’histoire fut remise au goût du jour pour ses vertus patriotiques, jusqu’à ce que la rupture de la peinture moderne des années 1870 emporte les derniers vestiges de l’Âge d’or danois, nous laissant à jamais cette image sereine d’un temps révolu.
« Tout est miracle, tout est magie dans la vie quotidienne ! » Hans Christian Andersen en lettre au physicien H.C. Orsted. Cette phrase d’Andersen qui traduit si bien l’esprit et le goût danois, s’applique avec évidence à la peinture de l’Âge d’or et ses registres privilégiés : portraits, scènes de genre, tableaux d’intérieurs, paysages, marines. Néanmoins si les peintres de cette période se sont attachés à la simplicité des sujets, ils y ont associé une technique savante et une facture délicate, ce paradoxe générant une peinture originale et subtile.
Eckersberg ouvrit la voie à cet Âge d’or, puis ses contemporains, ses élèves et les peintres de la génération suivante, chacun à sa manière, poursuivit sa recherche, son exploration autant dans la construction de l’espace pictural que dans la délicatesse des couleurs et de la lumière. Ainsi dans la réflexion sur la scénographie de l’exposition il nous a paru naturel d’intégrer ces paramètres si caractéristiques à la culture danoise, et dont on retrouve également l’influence dans l’environnement architectural et l’art de vivre.

L’architecture et le design danois, à l’image de la peinture, associent simplicité, rigueur des formes et des lignes, authenticité des matériaux, et recherche de modernité. Nous avons trouvé qu’il s’instaurait là un dialogue fécond entre scénographie et sujet de l’exposition. Nous avons abordé la visite de l’exposition d’une manière narrative, par le biais d’espaces ou passages qui vont stimuler l’imaginaire du visiteur au long du parcours. La gamme chromatique s’accorde avec les tonalités délicates de la palette de l’Âge d’or danois. On passera selon les sections, de couleurs nordiques et intenses — certaines provenant de l’univers de Thorvaldsen —, à des tons légers, atmosphériques, rapportés par les peintres d’Italie et de France, ou des tonalités fraîches et colorées des intérieurs danois, ou bien encore en contrepoint par des non couleurs, bruns et gris, contribuant à faire rayonner la lumière de certaines œuvres.
Scénographie : DBA sarl Didier Blin

L’Âge d’or de la peinture danoise, (1801-1864) – du 22 septembre 2020 au 3 janvier 2021 au Petit Palais.

Bouchra KIBBOU

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